François Marchand, Paris, noviembre 2007
L’intervention civile de paix : un engagement concret en faveur de la paix
Ce texte a été préparé au printemps 2007 au sein du Comité français pour l’intervention civile de paix avec l’aide des équipes de recherche de l’IRNC et du MAN. Présenté par François Marchand, co-président de Non-violence XXI aux Rencontres IRENEES, Paris les 13-14-15 novembre 2007
Introduction
De nouveaux contextes, de nouveaux conflits
Depuis les années 1990, les relations internationales sont entrées dans « l’ère de la gestion des crises ». Sur les cinq continents, des conflits éclatent ou sont latents depuis des décennies. Ils sont de plus en plus intra-étatiques, c’est-à-dire que différentes communautés, factions armées s’opposent à l’intérieur d’un même État. Les préoccupations de la communauté internationale sont nombreuses à ce sujet : ces conflits engendrent des instabilités régionales qui constituent un terreau favorable à d’autres menaces : terrorisme, crime organisé, etc.
Ces crises anéantissent notamment les efforts de coopération au développement des Pays du Nord à l’égard de certains Pays du Sud. Si l’on ajoute à cette dimension l’investissement d’une présence militaire de maintien de la paix, le total des coûts est considérable.
Des cadres d’action renouvelés
La communauté internationale s’est donc attachée à redéfinir ses priorités. La consolidation de la paix et la prévention des conflits sont ainsi devenues deux concepts phares qui ont pour ambition de guider ses actions à moyen et long terme.
À la fin des années 1990, les Nations unies ont adopté un certain nombre de mesures fondamentales pour notre époque.
Le 19 novembre 1998, l’Assemblée générale des Nations unies proclamait les années 2001-2010 : « Décennie internationale de la promotion d’une culture de la non-violence et de la paix au profit des enfants du monde ». Elle invitait « les États membres à prendre les mesures nécessaires pour que la pratique de la non-violence et de la paix soit enseignée à tous les niveaux de leurs sociétés respectives, y compris dans les établissements d’enseignements », l’Unesco étant l’agence nommée pour coordonner cette dynamique déclinée en programme d’actions.
En plus de ce cadre d’action dont nous nous revendiquons, plusieurs initiatives se mettent en place aux niveaux multilatéraux, européens et nationaux :
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Au niveau multilatéral : les Nations unies se sont dotées d’une Commission de consolidation de la paix en 2006, le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) a défini la prévention des crises comme un des ses six domaines prioritaires d’actions, la Banque mondiale a mis en place une Unité de prévention des conflits et de reconstruction, le Comité d’aide au développement de l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) a mis en place un réseau sur les conflits, la paix et la coopération pour le développement.
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Au niveau européen : l’Union européenne a adopté un « Programme pour la prévention des conflits violents » lors du sommet européen de Göteborg en 2001 et mis en place une Unité de prévention des conflits au sein de la Direction générale des Relations extérieures.
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Au niveau national : les priorités stratégiques de la plupart des États européens s’orientent aujourd’hui vers la prévention, la résolution des conflits et la consolidation de la paix (Royaume-Uni, Allemagne, Espagne, etc.).
Quelles applications sur le terrain ?
Ces orientations, ces programmes représentent des avancées encourageantes, mais posent tout de même la question de leur « opérationnalité » et de leur application sur le terrain.
Le principal défi est aujourd’hui de transférer ces processus de consolidation de la paix, de prévention ou de transformation des conflits afin que les populations locales, victimes des conflits, que les organisations des sociétés civiles locales se les approprient et en deviennent les acteurs de premier plan.
Il ne peut y avoir de paix juste et durable si ces acteurs locaux ne sont pas soutenus et reconnus comme un facteur décisif d’un processus de paix et de résolution du conflit. Certains États ont mis en place des programmes qui vont dans ce sens (Allemagne, Espagne) mais ils restent encore trop peu nombreux. Afin de remédier à ce manque de reconnaissance, le Comité français pour l’intervention civile de paix, plate-forme d’associations, a été créé en 1996. Il est constitué du Mouvement pour une alternative non-violente (MAN), du Comité catholique contre la faim et pour le développement (CCFD), de la Délégation catholique pour la Coopération (DCC), de l’Institut de recherche sur la résolution non-violente des conflits (IRNC), du Collectif Guatemala, de Pax Christi, de Peace Brigade International France (PBI) et du Comité de solidarité avec les communautés du Bas Atrato (Colombie). Il se mobilise pour promouvoir, auprès des pouvoirs publics français, un instrument pertinent de construction de la paix et de résolution non-violente des conflits : l’intervention civile de paix.
En effet, l’intervention civile de paix peut être une réponse concrète et efficace
À travers l’envoi de volontaires civils pour des missions d’accompagnement, de médiation, d’observation ou, encore, de témoignage, c’est un instrument de construction de la paix et de résolution des conflits au profit et en lien avec les populations et les organisations représentant les sociétés civiles locales.
Reconnaître, soutenir et promouvoir l’intervention civile de paix, c’est engager :
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Une action concrète en faveur de la paix
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Une action concrète en faveur du renforcement des capacités locales à agir pour la paix
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Une action concrète pour optimiser un processus de paix et de réconciliation
L’intervention civile, un engagement de paix concret.
A) L’intervention civile de paix contribue à la paix
1. Une diplomatie de proximité
L’intervention civile de paix (ICP) est un outil de gestion des crises. Opérationnel depuis les années 1980, il s’est fortement développé dans les années 1990.
L’ICP est constituée par un envoi en mission de volontaires civils qui participent, sur le terrain et auprès des organisations des sociétés civiles locales, à la construction de la paix et la résolution non-violente des conflits.
Une mission ICP peut être menée par une organisation internationale (OSCE – Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, ONU), un gouvernement, une collectivité locale (projet de coopération décentralisée) ou une organisation non gouvernementale (ONG).
Les volontaires de missions ICP doivent donc être qualifiés, formés aux techniques non-violentes de régulation des conflits et aux fonctions spécifiques qu’ils auront à accomplir.
L’intervention civile de paix s’inscrit globalement dans une démarche philosophique et stratégique non-violente. La non-violence n’est pas une négation de la violence, c’est, au contraire, une autre manière de penser un conflit et d’agir pour le résoudre. Elle n’est pas non plus une attitude passive de soumission mais bien une posture pro active résolument orientée vers la recherche et la proposition de solutions alternatives à la violence.
L’intervention civile de paix correspond ainsi à une stratégie d’action non-violente qui a pour objectif de faire coïncider la fin recherchée et les moyens employés. Elle tend à faire diminuer les niveaux de tension ou de violence afin de permettre aux acteurs de paix locaux de travailler, en sécurité, dans un environnement de conciliation plus serein et rationnel.
Une mission ICP consiste donc à :
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Apporter une présence dissuasive : bien souvent, l’accompagnement des acteurs de paix locaux par des équipes internationales de volontaires de paix constitue une présence dissuasive qui leur permet de mener leur travail sans subir les menaces de violences physiques et politiques. C’est notamment le cas en Amérique latine depuis plus de vingt ans. Grâce à cette présence et ce soutien, les défenseurs des droits de l’Homme peuvent continuer leur travail et participer aux processus de démocratisation et d’établissement d’un État de droit.
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Observer et témoigner de la situation sur le terrain : les atteintes aux droits de l’Homme, les violations des termes d’un accord entre parties en conflit, le déroulement des élections dans des zones de tension, doivent pouvoir être observés, répertoriés et communiqués avec rigueur et indépendance afin de conduire un processus viable et durable de démocratisation et de construction de la paix
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Favoriser le dialogue et la réconciliation : l’intervention d’un tiers est décisive pour servir d’intermédiaire entre parties en conflit. Créer un espace « neutre » où les acteurs de paix, des associations de jeunes et de femmes issues de chaque communauté puissent se retrouver, échanger et agir ensemble est une condition indispensable pour recréer des liens et entamer un processus de dialogue et réconciliation.
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Renforcer les capacités de la société civile locale : faire en sorte que les organisations de la société civile locale puissent agir et s’impliquer dans un processus de paix juste et durable, de résolution non-violente du conflit est une caractéristique essentielle d’une mission ICP et une condition sine qua non de la réussite de ces processus.
2. Des missions dans plusieurs pays
Depuis les années 1980, des missions d’intervention civile de paix contribuent au retour de la paix, à la résolution non-violente des conflits et au soutien d’acteurs locaux.
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Au Kosovo, après le conflit en 1999, plusieurs organisations françaises et européennes (Équipe de paix dans les Balkans, Assossiazione Per la Pace, Nansen Dialogue Group) se sont installées à Mitrovica, ville divisée, où les communautés serbes, albanaises et roms s’opposent. La communauté internationale ne parvient pas à trouver une solution à la question du statut. Cette action ciblée et localisée de plusieurs organisations insuffle une alternative et montre que la coopération est possible entre communautés.
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Au Guatemala, deux organisations (Peace Brigades International, Collectif Guatemala) mènent, depuis les années 1980, des programmes d’accompagnement. Dans ce pays déchiré par 36 ans de guerre civile, où la violence demeure un fléau qui mine la société, la simple présence de volontaires internationaux aux côtés des acteurs locaux (témoins des procès de génocidaires, défenseurs des droits de l’Homme, dirigeants d’organisations indiennes, etc.) constitue un moyen de dissuasion qui leur permet de mener leur travail sans subir de menaces ni de violences physiques ou politiques. Ces missions ICP participent ainsi au renforcement de la démocratie et à la défense des droits humains.
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En Israël-Palestine, plusieurs types d’organisations gouvernementales (Présence temporaire internationale à Hébron menée conjointement par le Danemark, l’Italie, la Norvège, la Suède, la Suisse et la Turquie, depuis 1996) et non-gouvernementales sont présents sur le terrain pour observer et témoigner de l’évolution du conflit, pour soutenir les organisations israéliennes et palestiniennes qui souhaitent engager un dialogue et des actions communes.
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Au Sri Lanka, où une guerre civile fait rage depuis une vingtaine d’années, l’ONG Non-violent Peaceforce intervient depuis 2004 pour soutenir, sur le terrain et auprès des organisations locales de la société civile, les négociations de paix et le cessez-le-feu. Les processus diplomatiques trouvent ainsi leur continuité grâce au travail de la trentaine de volontaires de paix présents sur le terrain.
B) Une contribution à la stabilité internationale
1. Une intervention aux côtés d’autres acteurs
Les crises sont aujourd’hui le théâtre de multiples interventions : militaires, humanitaires, organisations internationales, bailleurs de fonds, entreprises, etc.
Tous ces acteurs s’appliquent, chacun dans leur secteur, à maintenir la sécurité d’une zone, reconstruire les infrastructures, faire redémarrer une économie locale, mettre sur pied une administration, subvenir aux besoins sanitaires, etc.
Aux côtés de ces nombreux acteurs, les volontaires de paix interviennent dans un domaine bien particulier qui n’est investi par aucun autre : celui du renforcement des capacités des acteurs locaux à agir en faveur de la paix. Une mission ICP reconnaît l’apport des autres acteurs civils et militaires dans leurs domaines respectifs.
En effet, des civils, travaillant pour le compte d’ONG, sont mieux à même de réaliser ce travail minutieux de connaissance du terrain, des organisations et artisans de paix locaux. Ils ne sont pas neutres, au sens où, en travaillant pour la conciliation et l’accompagnement d’une issue au conflit, ils s’engagent auprès de l’ensemble des parties, avec discernement et équité.
2. Une action essentielle de solidarité internationale
Les liens entre paix et développement sont aujourd’hui largement reconnus. Il ne peut y avoir de processus de développement humain et durable sans l’établissement d’une paix juste et durable et réciproquement.
C’est le principe même du concept de « paix positive ». La paix n’est pas simplement une absence de conflits ou de violences physiques, c’est aussi une dynamique durable garantie par des structures et un environnement de justice sociale, d’équité.
La problématique des conflits se trouve aujourd’hui au cœur des enjeux de la solidarité internationale. En effet, les conflits anéantissent tout espoir de développement et l’absence de développement est un terreau favorable à l’émergence de nombreux conflits. Ce constat se vérifie également sur des zones en transition. Dans les Balkans, l’instabilité de l’espace yougoslave a fortement ralenti un développement économique viable. De même, les tensions qui persistent dans certaines régions empêchent l’essor politique et économique de ces nouveaux États et de leurs habitants.
Une intervention civile de paix peut s’appliquer durant les trois phases d’un conflit : avant, pendant et après. Pour chacune de ces phases de conflit, la stratégie consiste à renforcer la capacité des acteurs locaux à agir en faveur d’une résolution du conflit et de l’établissement d’une paix durable, de privilégier et soutenir les initiatives qui favorisent le dialogue, la coopération, le respect des droits fondamentaux, etc.
Aux côtés des organisations de solidarité internationale (coopération au développement, action humanitaire), les organisations qui mènent des missions d’intervention civile de paix ont une action complémentaire. En travaillant sur la question même du conflit, et plus particulièrement sur ses causes, sa nature, ses dynamiques, ces organisations participent à la stabilisation d’une zone et à l’établissement de conditions plus favorables aux processus de développement économique, social, humain et durable.
L’intervention civile de paix reconnue par la France
La France doit participer et promouvoir cette dynamique de résolution des conflits qui se développe déjà sur le plan international, européen et dans plusieurs pays. Pour cela, elle doit reconnaître et soutenir la mise en œuvre de l’ICP, contribution efficace à la construction et au maintien de la paix dans le monde.
Cette reconnaissance officielle doit s’accompagner de la reconnaissance des intervenants civils de paix et de la promotion d’une formation spécifique, garante de leur sécurité et d’un impact réel sur le terrain.
Ces deux conditions doivent être remplies pour que les volontaires puissent réaliser dans les faits leur volonté de s’engager pour la paix et la solidarité internationale.
A) L’intervention civile de paix, un moyen de gestion des crises
La France s’investit à plusieurs niveaux dans la gestion des crises : diplomatique, militaire, contributions financières aux organisations européennes, internationales et ONG humanitaires. Cependant, cet engagement est insuffisant dans la mesure où il ne concerne que trop rarement le soutien aux initiatives de paix des organisations des sociétés civiles locales. La reconnaissance et le soutien de la France à des missions ICP permettraient de renforcer cette connexion indispensable à la réussite d’une gestion de crise.
En effet, le rôle des organisations de la société civile des zones de conflit et des pays du Nord est aujourd’hui largement reconnu aux niveaux multilatéraux, européens ainsi que chez certains de nos voisins.
1. Une réelle entrée dans la dynamique européenne et multilatérale
Un rapport de la Banque mondiale affirmait récemment qu’« Aujourd’hui, la principale question dans le débat international n’est plus de savoir si la société civile a un rôle à jouer dans la consolidation de la paix, mais comment la société civile peut réaliser de la meilleure manière qui soit ses contributions bénéfiques » (1).
De même, dans son rapport sur la prévention des conflits armés (2001), Kofi Annan, souhaitant encourager les Nations unies à passer d’une « culture de réaction » à une « culture de prévention », appelait les ONG concernées par la question à s’organiser pour envisager une collaboration étroite (2). Cette mobilisation est effective depuis 2004 sous la forme d’un « Partenariat global pour la prévention des conflits armés ».
Enfin, pour envisager un renforcement de sa collaboration avec les organisations de la société civile, l’Union européenne s’est impliquée, depuis 2005, dans la mise en place d’un « Partenariat pour la Prévention des Conflits » et depuis 2006 dans la mise en place d’un « Partenariat pour la Consolidation de la Paix ».
Les organisations de la société civile sont donc les mieux à même de comprendre des dynamiques locales et ainsi d’opérer un travail efficace auprès des acteurs locaux, de façon indépendante, impartiale et en toute équité.
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Civil society and peacebuilding: potential, limitations and critical factors. Report no. 36445 – GLB ; June 2006
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Prevention of armed conflict. Report of the secretary general. June 2001.
2. Des pays voisins déjà engagés
Plusieurs États reconnaissent l’intervention civile de paix et ont mis en place des cadres favorisant leur intervention dans des zones de conflits :
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L’Allemagne a institutionnalisé l’intervention civile de paix en 1998 en créant un Service civil de paix. Placées sous l’égide du ministère de la Coopération, des ONG allemandes accréditées envoient des volontaires pour une durée minimum de deux ans après une période de formation de quatre mois. En 2005, 130 projets d’intervention civile de paix ont été menés en Afrique, Asie, Amérique latine, au Moyen-Orient et dans les Balkans.
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Le gouvernement catalan a adopté une loi (29 novembre 2006) sur la création d’un Institut de civils pour la paix dont le but est de former des futurs volontaires de paix, sur l’éducation à la culture de paix et sur la création d’un corps européen de volontaires de paix.
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En Italie, des associations italiennes mènent des programmes de réconciliation au Kosovo, à Chypre et en Géorgie dans le cadre du service national civil.
Alors même que l’intervention civile de paix est devenue un instrument pertinent et efficace de résolution des conflits et de construction de la paix, il doit être maintenant reconnu en France.
B) L’intervention civile de paix, volontariat de solidarité internationale
1. L’intervention civile de paix et la loi sur le volontariat international
La loi du 14 mars 2000 reconnaît la contribution des volontaires à la politique de paix de la France mais en raison de sa complexité, elle n’a pas eu de suite. La loi n° 2005-159 du 23 février 2005 relative au contrat de volontariat de solidarité internationale, instaurant un nouveau contrat de volontariat correspondant aux activités des organisations non-gouvernementales d’action humanitaire et de coopération au développement, permettrait la reconnaissance de cette intervention pour la paix.
Cette loi offre un cadre satisfaisant au déploiement de volontaires dans des contextes similaires à ceux d’une intervention civile de paix, c’est-à-dire hors Union européenne, dans des zones de conflit ou de tensions sociales et politiques.
Cependant, la spécificité des missions qui constituent une intervention civile de paix, l’importance fondamentale accordée à la formation des futurs volontaires nécessite un développement complémentaire pour permettre à ces intervenants de partir dans les meilleures conditions possibles.
2. Pas de missions d’intervention civile de paix sans formation
L’efficacité des missions ICP ainsi que la sécurité des volontaires civils dépendent à la fois du soutien international que les ONG reçoivent en situation de crise et de la formation préalablement suivie par les volontaires. Elle doit permettre aux citoyens de tout âge d’acquérir et de développer des capacités, aptitudes et qualités nécessaires à la conduite d’une mission d’intervention civile de paix en zone de conflit armé.
En France, seules les formations dirigées par les institutions européennes à destination d’experts civils et militaires sont prises en charge publiquement. Il s’agit de la formation sur les aspects civils de la gestion des crises délivrée par l’ENA.
Cependant, cette formation s’adresse à des personnes, généralement issues de l’administration, qui ont pour vocation à être détachées auprès des institutions intérimaires, européennes ou multilatérales, sur des zones de post-conflit et à remplir des fonctions essentiellement administratives.
Or le comité ICP propose une formation globale, qui s’adresse à un public plus large, devant participer à une mission ICP. Les objectifs pédagogiques sont différents et orientés vers l’acquisition d’aptitudes personnelles à gérer des situations et un environnement de tension et de conflit. Cette dimension de la formation est capitale puisqu’elle doit permettre aux futurs volontaires d’exercer le mandat de leur mission de manière sereine, rationnelle sans céder aux diverses pressions qui sont le fait de leur zone d’intervention.
La formation qui a été définie par les organisations membres du Comité ICP comprend trois modules d’une durée d’une semaine chacun. Elle aborde les questions de :
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compétence individuelle (gestion du stress, médiation, communication non-violente, principes de la non-violence) ;
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travail en équipe dans les situations de tension et d’urgence (coordination et animation d’équipe, prise de décision, modération, régulation des conflits interpersonnels) ;
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mandat de la mission du volontaire (fonction durant la mission, contexte d’intervention, gestion des aspects sécuritaires, coordination avec les autres acteurs de terrain, etc.).
La formation ICP a donc pour but de préparer les volontaires aux conditions d’exercice de leur mission, sur le terrain et auprès des populations et acteurs locaux, en toute sécurité.
PROPOSITIONS ET PERSPECTIVES
L’ICP est une contribution pertinente, efficace et peu onéreuse à la résolution des conflits armés en cours ou qui menacent d’exploser.
Elle permet de prévenir et gérer les conflits et facilite leur résolution politique. Jusqu’à présent, les missions d’intervention civile de paix ont principalement été réalisées en France dans le cadre d’ONG dont les moyens fort limités ne sont pas à la hauteur des urgences et des besoins qui apparaissent dans de nombreuses régions.
La France a un rôle important dans le maintien et la construction de la paix dans le monde. Il conviendrait qu’elle intègre, elle aussi, le principe de l’ICP dans sa politique internationale.
Ces programmes de prévention des crises et reconstruction de la paix doivent être ouverts à un personnel qualifié et spécialiste. C’est pourquoi une formation adéquate de ces acteurs de paix est essentielle.
Le Comité ICP souhaite donc obtenir aujourd’hui :
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La reconnaissance et le soutien politiques de l’intervention civile de paix. Celle-ci doit permettre un travail plus large entre l’État et les ONG pour la construction et le maintien de la paix.
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La promotion et le soutien d’une véritable formation des intervenants civils de paix, comme moyen substantiel pour assurer la sécurité et l’efficacité de leur mission sur le terrain.
La paix, la résolution des conflits dans le monde sont une des aspirations les plus fortes des citoyens en France. Reconnaître l’intervention civile de paix et lui donner les moyens d’exister efficacement est une réponse forte à cette demande citoyenne.
Le Comité français pour l’intervention civile de paix
Créé en 1997, le Comité français pour l’intervention civile de paix réunit autour d’une Charte pour l’intervention civile de paix différentes organisations de solidarité internationale, de développement, de construction et de maintien de la paix, de volontariat. Ses membres sont : le Comité catholique contre la faim et pour le développement (CCFD), les Brigades de paix internationales France (PBI), le Collectif Guatemala, le Comité de solidarité avec les communautés du Bas Atrato, la Délégation catholique pour la Coopération (DCC), le Mouvement pour une alternative non-violente (MAN), l’Institut de recherche sur la résolution non-violente des conflits (IRNC), Équipes de paix dans les Balkans-France (EpB) et Pax Christi France. Sur la base des engagements de ses membres pour la paix, le Comité ICP a pour but de promouvoir le volontariat de paix et d’assurer la formation des volontaires, sur les plans français et européen.
L’utilité de l’ICP a été reconnue par la Commission française pour l’Unesco, qui en 2000 a qualifié la formation à l’intervention civile de paix d’« action phare de l’Année internationale de la culture de paix » et par diverses organisations via leur participation au financement du Comité ICP : le dispositif ICP est soutenu financièrement par :
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La Fondation Charles Léopold Mayer pour le Progrès de l’homme (FPH) et la fondation « Un monde par tous » ;
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Par Non-violence XXI, fond associatif pour une culture de paix et de non-violence.
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En outre, le ministère des Affaires étrangères a apporté une aide en 2001 et le ministère de la Défense en 2001 et 2002.